Mardi 17 juillet 2007   
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La Suisse épaule le Vietnam sur la voie de l'ouverture
ACCORD. Les bases d'un système de protection de la propriété intellectuelle ont été posées grâce à un travail de pionnier. Il reste à l'appliquer plus efficacement. A terme, les entreprises étrangères profiteront d'un cadre juridique plus sûr.
Jean-Claude Péclet, Hanoi

Tant pis pour le folklore: le visiteur trouve moins de fausses Patek Philippe à 20 francs et autres contrefaçons au centre de Hanoi.

De façon moins anecdotique, le nombre de marques enregistrées au Vietnam est passé de 50000 à 100000 entre 2001 et 2005. Si le chemin reste long pour protéger efficacement la propriété intellectuelle, les autorités prennent l'enjeu très au sérieux depuis l'entrée du Vietnam à l'Organisation mondiale du commerce en janvier 2007. La Suisse a joué un rôle central dans cette prise de conscience.

En 1999, Berne et Hanoi signaient un accord de coopération en matière de propriété intellectuelle (SPC). Outre la meilleure protection réciproque - Syngenta (
SYNN.VX), entre autres, voyait ses produits copiés - un volet technique visait à préparer l'accession du Vietnam à l'OMC et à bâtir des compétences dans un domaine en friche. Car, sous le régime communiste, les droits de propriété intellectuelle étaient en mains de l'Etat. La joyeuse débrouillardise vietnamienne ayant pris le relais dans les années 90, le chaos régnait.

C'est là que la Suisse est entrée en scène avec l'accord SPC. «Elle est appréciée au Vietnam parce qu'elle n'a pas d'agenda caché», dit Daniel Keller, un consultant établi à Hanoi qui a suivi le dossier depuis le début. Des formations ad hoc ont été mises sur pied. Un groupe de 14 fonctionnaires vietnamiens a ainsi passé une semaine à l'Institut fédéral de la propriété intellectuelle à Berne pour se familiariser avec les standards internationaux.

Le 19 novembre 2005, l'assemblée nationale du Vietnam approuvait une loi sur la propriété intellectuelle, une première pour le pays. Ce n'était pas gagné d'avance: beaucoup de députés ne voyaient pas pourquoi il fallait faire ce cadeau aux pays développés, le Vietnam ayant peu de technologies de pointe.

Objection importante et en partie justifiée. Pourquoi consentir cet effort? Parce que le Vietnam a aussi des richesses à protéger - et en aura de plus en plus. Les Suisses ont axé leur coopération dans ce sens: ils aident les Vietnamiens à enregistrer correctement leurs savoirs et procédés traditionnels; à établir des «indications géographiques» (sortes d'appellations AOC, mais plus larges); à protéger leurs propres marques - de café par exemple - qui commençaient à être piratées aux Etats-Unis.
Doris Leuthard poursuit sa visite en asie. La conseillère fédérale et le ministre des Sciences et de la technologie du Vietnam ont signé lundi un accord qui prolonge de trois ans le transfert de savoir faire dans le domaine de la propriété intellectuelle, par un budjet d'un million de francs financé par la Suisse. Hanoi, 16 juillet 2007.


Cette approche «gagnant-gagnant» a été discutée à Berne entre une délégation de députés vietnamiens et des parlementaires suisses au moment où ces derniers révisaient la loi sur les brevets.

C'est ainsi qu'une majorité a été convaincue à Hanoi et que les bases du système ont été posées. «La démarche est un grand succès. L'office vietnamien de la propriété intellectuelle est bien géré, par des gens enthousiastes. Ce projet est un des plus avancés au monde», dit Daniel Keller.

Il reste pas mal de travail pour la mise en œuvre. C'est pourquoi, lundi, la conseillère fédérale Doris Leuthard et le ministre de la Science et de la technologie Hoang Van Phong ont signé un nouvel accord qui prolonge de trois ans le transfert de savoir-faire en matière de propriété intellectuelle, pour un budget d'un million de francs financé par la Suisse, sous la responsabilité du Secrétariat d'Etat à l'économie.

Les entreprises étrangères profiteront à terme d'un cadre juridique plus sûr; les entreprises vietnamiennes bénéficieront d'une meilleure protection de leur technologie au fur et à mesure que celle-ci se développera.

Première retombée directe, le représentant de Novartis (
NOVN.VX) Alexandre Jetzer a noué un contact universitaire pour établir des échanges scientifiques dans le domaine des substances naturelles.

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